Black Is King sorti le 31 juillet dernier, a bouleversé les réseaux sociaux. Le film est co-produit, réalisé et écrit par l’artiste américaine Beyoncé. Et il sert de support visuel à l’album du film le Roi Lion sorti en 2019.
UN FILM AVEC UNE HISTOIRE ORIGINELLE DENSE
L’annonce de la sortie de Black Is King sur la plateforme Disney +, en juillet a eu l’effet d’une bombe virtuelle. Instantanément, des débats ont commencé entre les répercussions du film quant à ses symboles. Ces débats entre les afro-américains, les Africains américains (des diasporas) et les Africains sont de plus en plus visibles sur les réseaux sociaux.
Il faut d’abord remettre les choses en place. « Black Is King » reprend l’histoire du film « Le Roi Lion »(1994). Le Roi Lion provient d’un manga japonais des années 50 nommé « le Roi Léon ». Il s’inspire aussi de la pièce de théâtre Britannique, « Hamlet ». Le manga a été repris par Disney dans les années 90. « Le Roi Lion » prend originellement place en Afrique Noire (Où? sûrement en Afrique Australe). Il était donc normal que l’Afrique et plusieurs de ses cultures y soient représentées. Mais de quelles manières ? Les débats qui ont suivi l’annonce du film renfermaient des peurs de types anthropologiques. Certains et certaines y voyaient encore une forme d’ascendance et de superficialité quant au traitement des cultures et cosmologies africaines. Des cultures et langues aussi riches, nombreuses et diverses que les pays Africains en eux-mêmes.
LES CRAINTES VIRTUELLES CONCERNANT LE BUT DU FILM


Après un visionnage du film, un avis objectif ressort : il s’agit d’un très beau projet visuel. La forme y est, ceci est indéniable. Les peurs concernant la visibilité de certaines cultures ou coutumes africaines ont vite été balayées. On observe au fil du film une carte implicite se tracer. Le film a été tourné dans plusieurs pays Africains. De l’Afrique du Sud au Ghana et au Nigéria. Le film navigue entre plusieurs cultures, mettant en valeurs danses, vêtements traditionnels. Beyoncé et l’équipe de production ont fait l’effort de mettre « l’Afrique » en premier plan. Des idées et problèmes sont quand même abordés avec notamment le titre « Brown Skin Girl » chanson célébrant les femmes noires foncées et contrant les méfaits du colorisme, palpable dans le monde entier. Les critiques précédant la sortie du film étaient peut être infondées mais tout de même légitimes. Après la fièvre internationale qu’à causer le film « Black Panther » il y a 2 ans, beaucoup d’africains et africaines du continent ont eu encore une fois peur de voir leurs cultures mais surtout leur image, utilisées ou dégradées.
UN ARRIERE GOUT DE LA SENSATION BLACK PANTHER ?
« Black Panther » (2018) était fondamental déjà sur le plan cinématographique. C’est un personnage clé de l’univers Marvel, qui méritait amplement un film expliquant son histoire et ses missions. Néanmoins, aussi essentiel qu’il pouvait être pour beaucoup de personnes noires, le film n’avait rien d’historique. Le film a révélé la place de la spiritualité et du spectre magico-religieux, sensible dans plusieurs ethnies d’Afrique Noire (animisme, ancestralisme). Cependant, il reste ancré dans un univers fantastique, proche de l’Afrofuturisme, mouvement littéraire et artistique qui vise à sortir les personnes noires des cases qui leur ont été attribuées pendant toute leur existence et en leur imaginant un futur opposé exhortant le passé et ses blessures.


Juxtaposé « Black Is King » à « Black Panther » est peut être ridicule, mais les deux films sortis à près de 2 ans d’écart et restent tout de même des histoires écrites par des personnes non noires, non issues d’un pays noir africain et créées il y a plus de 50 ans. Les deux films sont lancés et produits par des plateformes et studios américains. Même s’ils sont tournés dans certains pays africains, le public visé est encore assez flou. L’imaginaire prévaut avant le terrain et la retranscription réelle de ce que pouvait être d’africain(e). Le fait même que le film « Le Roi Lion » personnifie des animaux de la savane avant des personnes africaines noires restent très limite. Mais surtout les deux films jouent encore sur ce mélimélo et stéréotype que ce qu’est l’Afrique aux yeux du monde : un continent aux pays exploités, très étudiés mais peu compris et entendus sur la scène internationale. Dans les deux films, les Africains sont vus. Dans « Black Is King » plusieurs artistes nigériens comme Wizkid ou Tiwa Savage et Burna Boy ; sud africains avec les chanteuses Nija et Busiswa ; maliens avec Oumou Sangaré : camerounais avec le chanteur Salatiel ou même ghanéens comme le chanteur Shatta Wale, chantent et sont visibles. Black Is King célèbre à demi-mesure une idée joyeuse de ce qu’est l’Afrique, sans rentrer dans les détails.
CONCLUSION
« Black Is King » reste un support visuel à un album, lui même inspiré par une histoire. Le film avait pour volonté de célébrer une diversité plurielle de l’Afrique Noire. Cliché ou pas c’est chose faîte. Malheureusement, « Black Is King » peut encore véhiculer un message d’un continent africain condensé, joyeux, éparse, comme si on survolait les cultures et peuples de façon lointaine, comme un conte de fée. Le but de ces films américains reste de divertir, émerveiller ou a minima prendre conscience des cultures africaines. Malgré une équipe de réalisateurs très métissée, le film peut s’avérer être un chef d’oeuvre pour beaucoup et une énième fantaisie pour d’autres. Mais à vouloir survoler les réalités des pays africains de manière poétique ou féérique, il est normal que des voix s’élèvent pour s’opposer à ces fables.
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